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Les Melons
Une histoire complexe et colorée

paru dans le n°59 de la revue Fruits Oubliés


Par Christian Sunt ;
source : Chloé Gaspari GRAB


Prémices botaniques

Le melon, cet africain du sud

Le melon (Cucumis melo L) est un fruit qui appartient à la famille des cucurbitaceaes. Le melon cultivé appartient à la sous-espèce Cucumis melo L. subsp. melo dont le faux-fruit est très polymorphe. Le terme « melon » vient du latin
melo, melonis. Ce terme provient d’une racine grecque signifiant « pomme », « fruit » (« pomme » se dit malum en latin).
Le fruit sauvage d’origine ne dépassait pas 30 à 50 g mais il a servi de base à la définition de très nombreuses variétés. Celles-ci sont diversement rassemblées selon les auteurs en groupes, dont les plus importants sont :


Parmi les melons consommés comme fruits (récoltés à maturité):

- Le groupe cantalupensis, melon cantaloup ; 

melon cantaloup

- Le groupe reticulatus, melon brodé ;


- Le groupe inodorus, melon d’hiver.

Melon de Malte d'Hiver

 


Parmi les melons consommés comme légumes (récoltés avant maturité) :

Le groupe flexuosus, melon serpent ;
Le groupe momordica, melon phut (Inde).
C’est l’un des rares légumes originaire d’Afrique du Sud. Il arrive en Égypte au Ve siècle avant J.C. mais il venait peut-être alors de l’Iran, de l’Inde ou de la Chine. La Bible en parle, les Hébreux évoquant les melons d’autrefois, lors de leur traversée du désert.

Description

Le melon est une plante herbacée annuelle à tiges rampantes assez longues munies de vrilles. Les feuilles sont généralement entières ou légèrement lobées.
Les plantes sont monoïques (sexes séparés sur des fleurs distinctes), et les fleurs, unisexuées sont jaunes. Les fleurs mâles apparaissent les premières. Le melon fleurit tout l’été de mai à septembre.
Le fruit est généralement volumineux, de forme ovale ou ronde et porte sur sa peau des divisions nettement dessinées. Sa peau est plus ou moins lisse, ou bosselée, côtelée, brodée ou galeuse, sa couleur varie de tous les tons du vert au jaune en passant par le blanc. La pulpe de couleur jaune à orangé est très juteuse et très parfumée à maturité. La cavité centrale, fibreuse, renferme de nombreux pépins.

Mortelle cucurbitaceae...

Il fait partie des plantes potagères énumérées dans le capitulaire de Villis par Charlemagne au début du IXe siècle. En 1495, le roi Charles VIII, de retour des guerres d’Italie, le réintroduit en France. Cependant, les variétés d’alors cultivées étaient peu sucrées et consommées en salades.
Était cultivée à Rome, en provenance d’Arménie, une variété ronde à chair orangée et savoureuse, dans la propriété des papes à Conta Lupi, d’où son nom de Cantaloup. Et il a déjà une mauvaise renommée : le pape Paul II serait mort d’une indigestion de melons en 1471. Clément V aura le même sort en 1605. On dit qu’un empereur d’Autriche avait connu les mêmes ennuis définitifs au XIVe siècle et que Henri IV et Louis XIV, qui étaient de grands amateurs de ce fruit auraient également eu à subir les ennuis intestinaux que sa consommation entraînait.
Quoi qu’il en soit, le melon est également à Cavaillon depuis la fin du XVe siècle au moins, et il devient courant d’en expédier de pleines charretées jusqu’à Marseille. Puis il rejoint le Val de Loire, l’Anjou et la Touraine. De là, il approvisionne la Cour et les marchés de Paris. Ce n’est que plus tard qu’il se propage en Charente, où par sélection, les célèbres « cantaloups charentais », puis le « charentais brodé », seront créés bien plus tard.

« La chair du melon, qui est un fruit d’été, est l’une des productions du potager les plus délicieuses, elle est humectante, réjouit le cœur et tempère les ardeurs du sang, en un mot, elle fournit un aliment agréable et aisé à digérer, surtout quand on le mange avec un peu de poivre et de sel ou avec du sucre et qu’on boit du bon vin par dessus mais l’excès est dangereux, il produit des fièvres, des vents et des coliques fâcheuses, suivies quelquefois de dysenteries difficiles à guérir. Les vieillards et ceux qui ont un tempérament mélancolique doivent s’abstenir ».

 


Et voici une petite sélection de variétés a tester


Melon sucrin de Tours

Vigoureux, très rustique, demi-hâtif, de culture facile, convient surtout pour faire en pleine terre l’été, de même que les autres melons dits maraîchers. Peut porter trois fruits. Ceux-ci sont sphériques, à côtes à peine indiquées, entièrement recouverts de larges broderies blanc grisâtre et ont, en moyenne, 15 à 16 cent. de diamètre. Chair rouge, orange, épaisse, sucrée de bonne qualité.

Melon Sucrin de tours Sucrin de tours vilmorin Andrieux

Graines disponibles :
http://www.fermedesaintemarthe.com


Melon de Cavaillon tranche à chair verte

Le Melon Cavaillon Tranche à Chair Verte est un vieux melon de Cavaillon. Les melons tranches se distinguent par leurs côtes très marquées. Ce melon à confire est un melon très esthétique. La variété à chair rouge est une plante vigoureuse, à feuillage entier vert franc. Ses fruits sont de tailles moyennes, sphériques un peu aplatis, très côtelés, vert clair à blanc argenté. Ils se distinguent par une forte présence de liège. La chair est orangée, ferme et peu sucrée, d’où une consommation orientée vers le fruit confit. Comme tous les types “charentais”, climactérique, ce melon a une faible durée de conservation (une à deux semaines). Cette variété est maintenue aux ressources génétiques de l’INRA.

Origine historique
Dans le midi, les environs de Cavaillon étaient un des plus grands centres de production de melons. Il s’y cultivait un grand nombre de variétés distinctes, de telle sorte que le nom Melon de Cavaillon donnait le plus souvent une simple indication de la provenance qu’une variété désignation d’espèce. Le Melon de Cavaillon Tranche à Chair Verte, tel que nous le décrivons ici, n’est actuellement plus du tout cultivé, mais d’autres types modernes de “charentais” prennent le nom de Melon de Cavaillon (source: “Dictionnaire Vilmorin”, 1904).

Hier et aujourd’hui
Les premiers melons domestiqués devaient probablement être non sucrés et correspondaient à une utilisation comme “légumes” soit cru comme du concombre, soit cuit. Ils peuvent être également confits au sel et au vinaigre comme des cornichons. Sous forme de “légumes”, ils sont généralement récoltés immatures. Les premières descrip­tions entretiennent une assez grande incertitude entre le “melon-légume” et le concombre. Cependant il est à peu près certain maintenant que les Égyptiens anciens ne connaissaient pas le concombre. L’hypothèse est que ce qu’ils appelaient melons étaient en réalité des pastèques, et que leurs concombres étaient ce qu’on appelle aujourd’hui les melons (source : “Ressources génétiques, diversité et amélioration du melon”, Michel Pitrat).

Melon Cavaillon Tranche à chair verte


Melon d’Antibes blanc

Ce melon de garde ou d’hivers réussit particulièrement dans les régions chaudes et est de bonne conservation. La plante est vigoureuse et se distingue des autres variétés par son feuillage léger. Ses fruits sont courtement ovoïdes, d’un blanc mat, tout à fait lisse à la maturité. Sa chair est verte pouvant tirer sur le orange une fois très mur, elle est très sucrée et aqueuse, d’un goût frais, parfumé et très agréable. Le Melon Blanc d’Antibes est maintenu au Centre de Ressources Biologique de l’INRA à Montfavet.

Origine historique
Il existe trois types de variétés botaniques qui étaient destinés à alimenter les marchés locaux français : cantalupensis, reticulatus et inodorus. Le type inodorus plus tardif était cultivé essentiellement dans le Sud de la France. Ce dernier type présente souvent des fruits non odorants et moins sucrés que les autres cultivars (sources : “Ressources Génétiques, diversité et amélioration du melon” Michel Pitrat).
Son type de maturation non climatérique produit un fruit de bonne conservation (plus d’un mois), et il était très apprécié pour constituer des réserves non seulement dans le midi, mais aussi à Paris où il était vendu en hivers (source : “Histoire et amélioration de cinquante plantes cultivée”, Claire Doré, F. Varoquaux).

Hier et aujourd’hui
Le melon Blanc d’Antibes a joué un grand rôle dans l’amélioration du melon. En effet, cette variété population est à l’origine du type honeydew ou melon de miel aujourd’hui cultivé et très célèbre aux États-Unis, en Amérique, en Australie et en Asie (sources : “Ressources Génétiques, diversité et amélioration du melon” Michel Pitrat).

 


Melon vert-olive d’hiver

Ce melon de garde ou d’hivers réussit particulièrement dans les régions chaudes. Semé tard, il peut se conserver jusqu’au mois de février: on reconnaît qu’il est bon à consommer lorsqu’il commence à se tacher. Le fruit est ovoïde ou en forme de goutte d’eau, son écorce est plissée et d’un vert plus ou moins foncé à maturité. Sa chair verte à orange selon le stade de maturité est craquante, juteuse, sucrée et présente un léger goût de noix. Le Melon Vert Olive d’Hiver est maintenu au Centre de Ressources Biologique de l’INRA à Montfavet.

Origine historique
On retrouve sa trace dans le dictionnaire de Vilmorin de 1904. Il est dans cet ouvrage également surnommé “melon espagnol tardif”, ce qui nous donne une idée de sa véritable origine. Dans le midi de la France, on l’appelle aussi “melon de Noël”. Cet ouvrage nous informe que ce melon était cultivé dans le midi de l’Europe et en Algérie. Il était destiné à l’exportation vers les grandes villes du nord (notamment Paris) à l’arrière-saison (source: “Dictionnaire Vilmorin”, 1904). Son nom lui vient aussi bien de sa forme que de la couleur de son écorce. Il fait partie des types “Inodorus” non climatériques et tardifs qui étaient cultivés essentiellement dans le Sud de la France (sources: “Ressources Génétiques, diversité et amélioration du melon”, Michel Pitrat).

melon vert olive


Autres variétés de melons

Il existe plusieurs types de melon :
- Melon brodé (Cucumis melo reticulatus) : forme ronde, écorce liégeuse en relief, chair orangée. Sa peau épaisse avec du relief le caractérise.
- Melon cantaloup (Cucumis melo cantalupensis) : chair orangée, forme ronde, écorce lisse. Le fruit est rond, l’écorce lisse ou «écrite» (c’est-à-dire présentant une formation liégeuse de faible intensité) vert clair, jaunissant légèrement à maturité, avec des lignes de suture (sillons) plus foncées, il pèse environ 1 kg. La chair est orangée, sucrée, juteuse et très parfumée. La maturation est climactérique (sa maturation est dépendante de l’éthylène). Les variétés anciennes sont à faible durée de conservation alors que certaines variétés récentes ont une plus longue durée de conservation.
- Melon Galia : forme ronde, peau brun orangé, chair émeraude.
- Melon Sucrin
- Melon inodore (Cucumis melo inodorus) : caractérisé par une peau lisse et inodore :
- Melon d’Espagne
- Melon Honeydew : aussi appelé melon miel. Le fruit est rond, l’écorce est lisse, blanc gris. Il pèse 2 kg. La chair est verdâtre (parfois orangée dans certaines variétés récentes). Ce type à maturation non climactérique produit un fruit de bonne conservation. Il est cultivé aux États-Unis, en Amérique, en Australie et en Asie. Il dérive de l’ancienne variété «Blanc d’Antibes d’hiver».
Certaines variétés aromatiques et à faible durée de conservation sont climactériques et d’autres peu aromatiques mais de longue conservation ne le sont pas.

En France

Quatre types variétaux sont principalement cultivés : le « cantaloup charentais », le « charentais brodé » , le « vert olive » (écorce vert olive, forme ovale) et le « galia » .
D’autres variétés plus anciennes sont encore cultivées, mais semblent être en voie de disparition : serpent, rouge de Perse, petit gris de Rennes, sucrin de Tours Noir des Carmes et melon de Trets

Bons soins, bons usages et bonnes vertus !

Nous avons également quelques détails précis sur sa culture dans le « dictionnaire raisonné d’histoire naturelle » de Valmont de Bomare (1776). Il explique que: si en Italie on le cultive en pleine terre, chez nous il ne peut s’élever qu’en couches « dans une melonnière exposée au midi, car il faut nécessairement qu’elle soit à l’abri des vents froids, soit par murs hauts, soit par des brise-vents farts de paille avec des perches ». Texte intéressant qui mentionne la présence de haies artificielles qui ne sont pas encore nos « sébisses » en cannes, mais qui pourraient bien être l’ancêtre de nos canisses. Je rappelle que les haies de cyprès ne sont, à ma connaissance, apparues dans le paysage provençal que dans le premier tiers du XIXe siècle (statistique des Bouches-du-Rhône du comte de Villeneuve).
Il a aussi ces soins des maraîchers pour conserver la graine, soins que nos parents connaissaient encore, mais que les variétés hybrides d’aujourd’hui nous ont fait oublier :
« Il y a des jardiniers qui prétendent que la graine la plus vieille est la meilleure, et qu’il faut la mettre à tremper dix ou douze heures dans du fort vinaigre, où l’on a délayé un peu de suie de cheminée afin que les souris et les mulots ne l’aillent point manger ».
Je me souviens pour ma part, que l’on conservait les graines des bons melons, tenues, lourds et bien remplis. Le même ouvrage signale même que l’on vendait des liqueurs préparées « pour arroser la graine de melon afin de la rendre sucrée ». Cette même graine «sert également à faire des émulsions rafraîchissantes, utiles dans les grandes chaleurs d’entrailles et dans les difficultés d’uriner. On tire de son amande une huile par expression fort anodine, propre pour les âcretés de la poitrine et pour effacer les taches de la peau ». Décidément, rien n’est perdu et que voilà des vertus inconnues !

Production, production...

Le maire de Cavaillon signale en fin de XIXe siècle que les melons sont décidément trop irrigués et... engraissés : ils n’ont déjà plus la saveur de ceux du XVIIIe !
Dans le Vaucluse, la généralisation de la culture forcée date de cette fin du XIXe siècle. Elle se fait alors sous châssis et l’on citait le cantaloup orange qui se vendait à la douzaine. Mais le langage populaire distinguait les tranchés, les cantaloups à chair verte, et les cantaloups musqués.
Les deux grands tournants récents sont dus à l’évolution technique : la généralisation des cultures sous serres dans les années soixante-dix et le retour sur le marché des types « brodés » via la variété Gallia qui nous venait d’Espagne. Enfin, plus récemment, la domination du marché par la grande distribution, a permis la réussite des machines à tester la teneur en sucre du melon.
De véritables multinationales de production du melon sont nées, notamment dans le Centre-Ouest (du côté des Charentes). Elles ont d’abord loué des terres sur place (cela se chiffre par centaines d’hectares pour la même société), puis la décision économique d’étaler la récolte en profitant des différences climatiques des régions s’est imposée : on commence en Guadeloupe, on continue en Espagne et dans le Languedoc, on finit dans l’Ouest.

D’après la conférence de Jacques Galas
- Août 1995 à la Fête du Melon
Sarrians - (Vaucluse)


 

 
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